L’Assassin de Septembre de Jean-Christophe Portes

C’est déjà le sixième tome des aventures de Victor Dauterive que je lis et j’avoue y prendre toujours autant de plaisir. Jean-Christophe Portes associe, avec brio, à la précision historico-politique un talent indéniable de conteur. Avant de vous en dire plus sur cet opus, voici la quatrième de couverture :

Été 1792. Les Prussiens envahissent la France pour tenter de mettre fin à la Révolution. Ils assiègent Verdun, dernière ville forte avant Paris. Victor Dauterive, missionné par Danton, doit convaincre le commandant de la garnison de tenir bon jusqu’à l’arrivée des renforts français.
Mais dans la ville, l’agitation est à son comble et un mystérieux jeune homme parvient peu à peu à persuader les habitants qu’il est dans leur intérêt de capituler. Le commandant qui refusait de se rendre, est retrouvé mort, assassiné.
Dauterive doit agir au plus vite pour sauver la Révolution. Entre complotistes royalistes, révolutionnaires aux abois et espions étrangers sans scrupules, il va naviguer en eaux troubles. Une nouvelle mission qui pourrait bien lui coûter la vie…

Pour ceux qui ne connaissent pas cette saga, je vous encourage chaleureusement à découvrir mes chroniques des tomes précédents.

Nous sommes en 1792. La Révolution semble avoir réussi mais est tout autant sur le point d’échouer. Le roi et sa famille ont été emprisonnés mais les armées étrangères comptent bien les délivrer afin d’éviter une contamination des idéaux révolutionnaires dans toute l’Europe. C’est donc une tenaille qui enserre la France et Danton : les ennemis sont à l’extérieur et au cœur même du pays. Voilà le contexte. C’est ce qui permet à l’auteur de construire une intrigue aussi politique que militaire, au sein de laquelle il est possible de faire coexister combats et enquêtes, pour le plus grand plaisir des lecteurs.

Cette tension se diffuse sur les destins de nos personnages. Je crois que nous avons là le tome le plus sombre. L’un des personnages principaux passe une bonne partie du roman entre la vie et la mort, plus près de la mort que de la vie à vrai dire. Olympe et Victor sont souvent séparés et semblent ne plus réussir à se comprendre. Joseph devient plus sérieux, plus réfléchi, plus adulte. Mais Victor… Quelle évolution !… Jamais il ne m’a autant touchée qu’ici. Le fougueux jeune homme semble désabusé et si le terme est évidemment anachronique, il n’en reste pas moins juste : Victor fait une dépression. Et l’on ne peut que le comprendre. Tout est mené par Jean-Christophe Portes avec subtilité. C’est quand le héros est seul, quand il se projette, que l’on sent tout le poids des blessures qu’il a reçues jusque-là. Les idéaux de la Révolution montrent leurs limites par le prisme des expériences de Victor et malgré les enthousiastes « ça ira » entonnés régulièrement, la colère, le dégoût et la déception minent l’engouement du héros.

Au milieu de cette obscure gravité, l’auteur parvient quand même à parsemer son récit de petites touches de légèreté. Charpier reste fidèle ; Olympe reste fougueuse, tout comme Joseph. Et puis, il y a cette histoire d’amour condamnée (croit-on, mais sait-on jamais) entre nos deux héros. C’est une intrigue discrète qui fonctionne comme un fil rouge dans cette saga qui n’a pas pour vocation à être sentimentale. Ici, la jalousie vient relever la saveur de cette relation. Mais cette fin… Je ne vous dirai rien, évidemment, si ce n’est que j’ai senti les larmes me monter aux yeux.

C’est donc, encore une fois, une belle réussite pour Jean-Christophe Portes qui satisfait, avec ce sixième opus, nos cœurs de lecteurs friands d’aventures, de dangers, de complots, mais aussi nos cœurs de lecteurs sensibles à l’amour, à la psychologie. Autant le dire tout de suite, je n’en ai pas fini avec Victor Dauterive… Merci M. Portes !

Priscilla