Trois tragédies de Tristan L’Hermite sont au programme de l’agrégation cette année et la professeure chargée de nous faire les cours nous a encouragés à découvrir son roman Le Page disgracié. J’ai profité de ce début d’été pour faire connaissance avec l’auteur et avec le texte…
Voici la quatrième de couverture :
Roman autobiographique (1643) du grand poète baroque Tristan L’Hermite, Le Page disgracié retrace la vie d’un page à la cour d’Henri IV, sa fuite en Angleterre, mille autres aventures. Un style fin, poétique et tendre fait de ce récit un livre unique en son temps et l’une des grandes dates – méconnues – du roman au XVIIe siècle. Le Page disgracié a tout pour séduire un lecteur d’aujourd’hui. Écrit sous forme d’autobiographie, en chapitres courts, il divertit par la variété de ses épisodes, le mélange de ses registres, l’élégance de son style, l’abondance des personnages qu’il met en scène, la finesse du regard que l’auteur porte sur eux. C’est aussi un roman moderne, parce que c’est un roman de formation, et que l’auteur, qui raconte sa vie trente ans plus tard, est rempli d’une mélancolie atténuée par l’humour.
Ce roman autobiographique a le premier intérêt de nous plonger de plain-pied dans l’époque. Très rapidement, le page fréquente des grandes familles, est confronté aux codes des cours et de la noblesse. D’origine modeste, il est repéré pour ses talents et formé aux côtés d’un prince.
A la croisée des chemins entre le roman picaresque, le roman d’apprentissage et le roman libertin, cet ouvrage nous promène à travers différents lieux, différentes tonalités dans des chapitres très courts et au rythme enlevé. Sous prétexte d’une lettre à un Thyrinte dont nous ne savons rien, c’est toute la société qui passe sous l’œil avisé de cet enfant devenu adulte. Il fréquente les princes, leurs précepteurs, les bourgeois, les nobles dont il se fait le page, le formateur, le secrétaire, puis l’ami.
Mais ce qui fait tout le sel de cette histoire, c’est qu’il n’est pas un prince. Très facétieux petit, le page deviendra rapidement un joueur invétéré, ce qui le poussera à accumuler des dettes, des mensonges et des punitions. En le suivant dans son apprentissage, nous le voyons être capable de réciter des fables, puis d’inventer des histoires et enfin d’écrire ses propres poèmes, médiocres dans un premier temps, aboutis quelques années plus tard.
Ce petit homme évolue aussi au contact d’autres personnages : certains sont positifs, d’autres beaucoup moins et c’est toujours par la faute de ces derniers que le page sera disgracié et devra partir. Nous le suivons donc en France, en Angleterre, en Norvège, à la guerre. Il fréquente des nains, des marchands, des comédiens, des femmes et même un alchimiste. On le voit apprendre l’amour, l’amitié, mais aussi la trahison et le vol. J’ai beaucoup aimé sa relation avec l’alchimiste (dont on ne sait pas finalement si c’est un personnage positif ou un menteur) et avec la femme qu’il aime, la jeune Anglaise (avec laquelle il se comporte comme l’amant courtois, parfait et sacrifié à l’honneur).
Beaucoup d’humour parsème les épisodes : les farces sont parfois amusantes, souvent cruelles et, sous l’apparence de petites vengeances, de règlements de comptes sans conséquence, elles laissent voir le vice de certains personnages jaloux, manipulateurs et haineux. Mais le page sera aussi rapidement confronté à la guerre et devra faire preuve de courage en plus de la ruse.
C’est donc un roman riche, une succession de petites aventures qui ont toutes du charme. L’histoire s’arrête alors que le page est encore très jeune et promet une suite que Tristan L’Hermite n’a finalement pas écrite.
Quel rapport avec les pièces au programme ? Je ne l’ai pas encore bien saisi, mais peut-être l’évidence me sautera-t-elle aux yeux quand je les relirai plus attentivement que la première fois… En tout cas, je vous en reparlerai.
Priscilla
Livresque78 