Simple de Julie Estève

J’ai – encore – quitté le poids pharamineux de ma pile de services presses pour découvrir le roman de Julie Estève dont j’avais entendu beaucoup de bien, que j’avais emprunté à ma médiathèque et que je devais rendre…samedi dernier !

Simple… Un titre énigmatique qui renvoie à l’identité du personnage principal, Antoine Orsini, l’idiot du village. C’est dans sa tête que le lecteur est plongé, c’est par sa voix que l’intrigue est campée. Une intrigue qui, elle, n’a rien de simple.

norDialoguant avec une chaise fêlée puis avec le pied de chaise seulement, suite à un accès de colère, le narrateur nous promène dans son village, dans ses souvenirs. La chronologie est mise à mal, on apprend par bribes ce qui s’est passé dans ce petit village oppressant et asphyxiant pour tous les personnages principaux. La mort d’une jeune fille de seize ans. C’est encore par fulgurances qu’on apprend l’accusation injuste du narrateur, sa détention pendant plusieurs années, mais aussi son enfance, ses déceptions, ses illusions et la vérité. Une vérité dont on comprend que personne ne l’a véritablement cherchée.

Dans ce roman, le style est haché, le discours se veut simpliste, n’hésitant pas à utiliser la vulgarité, la grossièreté même. Mais la réussite de Julie Estève, c’est de faire de ce style oral et populaire, la voie d’accès à une poésie de l’âme. Un peu à la manière de Céline dans Voyage au bout de la nuit, finalement. La naïveté d’Antoine, sa sincérité, son absence de filtre nous donnent à voir la réalité avec une grande trivialité et une grande violence. Et finalement, ce qui se fait jour immédiatement, c’est que le monstre n’est pas celui qu’on croit.

Qu’on adhère au style ou non, qu’on s’attache au personnage ou pas, on est rapidement scotché à notre fauteuil, brûlant d’envie de connaître le fin mot de l’histoire. Car, bien sûr, le « taré » est l’être le plus pur de ce village, le seul qui ne se laisse pas embrigader par les rumeurs, qui ne laisse pas guider par le qu’en dira-t-on, le seul qui soit véritablement sain d’esprit. Et pourtant, pas de happy end, on le sait d’entrée de jeu, Antoine meurt, laissant ses compatriotes dans l’ignorance la plus crasse, dans la méchanceté la plus cruelle. Une définition riche et complexe du bouc émissaire, son rôle et sa signification…

Priscilla (@priss0904, @litterapriscilla, Page Facebook)

4 Comments

  1. Je l’ai lu il y a quelques mois, réalise que la chronique est restée dans les oubliettes de les brouillons bien que rédigée. J’ai été gênée par le style, même si le récit est très beau… Un sentiment mitigé donc..

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