Les Classiques de Priscilla – Emma de Jane Austen

Quel bonheur pour moi de renouer avec ma tradition personnelle de fin d’année : Jane Austen ! J’avais dû y renoncer l’année dernière pour cause d’agrégation intensive, je n’ai donc pas boudé mon plaisir la semaine dernière en plongeant dans Emma.

Voici la quatrième de couverture :

Depuis qu’Emma a réussi à arranger le mariage de son ancienne gouvernante, elle se met en tête d’unir tous les gens qui l’entourent. Désormais maîtresse de maison, elle s’attribue ce rôle d’entremetteuse sans savoir que son inexpérience des êtres et des cœurs peut la mener à de nombreuses déconvenues. Entre les nouvelles rencontres, les visites de Mr Knightley, un vieil ami de la famille, et ses projets de mariage, Emma finit par se perdre elle-même sans s’apercevoir que ce dont elle rêve depuis toujours risque de lui échapper à tout jamais…

Encore une œuvre savoureuse de Jane Austen ! J’avoue avoir eu un peu de mal à entrer dans le récit. Le début de cette histoire m’a prise au dépourvu. Je n’arrivais pas à m’attacher à Emma, ni à son père, que je sentais pourtant être des personnages positifs. Ma confiance en l’autrice étant entière, j’ai évidemment continué ma lecture et peu à peu le charme a opéré.

Vous le savez maintenant, j’aime, chez Jane Austen, tout autant le côté romantique des histoires d’amour de la haute bourgeoisie anglaise que la vision acerbe de la satiriste de son propre monde. Ici, je n’ai pas été déçue. Dans la peinture de cet univers provincial au sein duquel les familles se côtoient, se jaugent et rivalisent de méchanceté, on n’est plus si éloigné de ce que montrera Flaubert avec le pharmacien, M. Homais, dans Mme Bovary. Les codes, les mariages, les bals, tout est passé au peigne fin, révélant ainsi le peu de naturel de ces relations. Les personnages principaux eux-mêmes ne sont pas dépourvus de préjugés, ils se soumettent aux lois sociales et n’acceptent pas plus que les autres qu’on épouse quelqu’un en-dessous de son rang ou qu’on se permette d’inviter ou d’évincer les plus anciennes familles du comté.

Le personnage de M. Woodhouse, pour sympathique qu’il soit, est peu plaisant. Sa peur des maladies, son rejet des mondanités pourraient le rendre attachant, mais lui-même va trop loin et devient une caricature, qui m’a fait plus souvent lever les yeux au ciel que sourire. Poursuivons dans le catalogue des caractères, ce que je préfère. J’avoue avoir été amusée par Miss Bates, la tante, qui ne fait que parler, qui épuise tout le monde à force de louanges sur sa nièce mais qui ne voit que le bien chez tout un chacun : naïve mais touchante. Jane Fairfax est restée une énigme, je ne parvenais pas à être aussi dure qu’Emma, mais je ne me suis pas sentie non plus fascinée par sa personnalité, elle m’a…dérangée, jusqu’à ce que le voile se lève. Dans le genre candide, j’avoue qu’Harriett m’a bien plus horripilée. On n’est plus dans la naïveté, on est dans le vide, la bêtise. Mais là encore, elle n’est idiote que parce qu’elle n’est pas à sa place et c’est finalement davantage de la faute d’Emma. Emma… Que dire ? C’est la jeune fille impétueuse et inexpérimentée. Elle se trompe sans cesse, en étant persuadée d’avoir raison. L’autrice nous fait lire en son cœur bien plus vite qu’elle n’y parvient seule et son cheminement est de fait intéressant, même si…très lent ! Mon cœur a été finalement très vite acquis à Mr et Mrs Weston, simples, humbles et bienveillants. Notons que les hommes ne sont pas mieux lotis que ces dames, à part Knightley, dont j’ai tout de suite apprécié le flegme ; Churchill est léger et manipulateur, Elton fourbe et arrogant, il n’y a guère que le fermier, dont on ne peut que louer la constance. Comment ne pas évoquer l’infecte Mrs Elton maintenant ? La caricature de la mégère. Mrs Oleson au pays de Jane Austen !

Vous l’aurez compris, encore une fois, Hartfield a bien plus à offrir qu’une simple comédie romantique. Avec sa plume mordante et sa manière unique de décortiquer le cœur humain, Jane Austen m’a embarquée dans une imbrication de petites histoires que j’ai eu du mal à démêler parfois et qui redonnent du souffle à un récit somme toute traditionnel, celui d’une jeune femme qui découvre l’amour alors qu’elle croit connaître la vie.

Priscilla

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